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5 août 2015

Migrants de Calais : pourquoi Xavier Bertrand a raison..

Migrants de Calais : pourquoi Xavier Bertrand a raison

 

 

FIGAROVOX/TRIBUNE - Xavier Bertrand a dénoncé la responsabilité de l'Angleterre dans la situation des migrants de Calais. Pour Henri Labayle, face à l'ampleur de la crise, la réponse doit être européenne.

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Henri Labayle est professeur agrégé de droit à la faculté de Bayonne et à l'université de Pau. Il dirige le CDRE, laboratoire de recherches spécialisé en matière européenne et notamment en droits fondamentaux, d'immigration et de sécurité intérieure. Il est membre du réseau Odysseus et directeur du GDR «Droit de l'espace de liberté, sécurité, justice».


La sortie de Xavier Bertrand sur l'incongruité de la situation des migrants à Calais est à la fois justifiée et décalée. Flattant notre anglophobie naturelle, elle a pour mérite de nous obliger à réfléchir à la complexité de la question migratoire, en France et en Europe.

Le dispositif applicable au port de Calais ou au tunnel sous la Manche était un dispositif de temps calme. L'évolution des choses a voulu que le Royaume Uni cesse d'être une île et que le marché exige la libre circulation des marchandises et des activités. Le paramètre économique l'a emporté sur tout le reste, ce que nous avons assumé tant bien que mal près de vingt ans. Quoi qu'en pense une part de l'opinion publique ignorante de la réalité et instrumentalisée de façon politicienne, Schengen a rempli l'essentiel de sa fonction. A une condition près: que le contexte de son adoption, avant l'arrivée des pays de l'Est ou la déstabilisation du bassin méditerranéen, demeure inchangé. Que la tempête survienne et rien n'a plus été.

Consentir à la fin du siècle dernier une situation exorbitante au Royaume Uni, son opt-out dans Schengen, et le report du contrôle de ses frontières en France, pouvait donc se comprendre. D'Hubert Védrine à Nicolas Sarkozy, la gauche et la droite y ont sacrifié. La frontière franco-britannique étant une frontière extérieure de l'espace Schengen, la France avait et conserve l'obligation d'opérer les contrôles d'entrée et de sortie de son territoire. D'où la multitude d'accords et autres «arrangements» entre les deux Etats. D'où, aussi, la colère britannique nous accusant de défaillances identiques à celles que nous-mêmes reprochions aux Italiens, à Vintimille il y a trois mois …

La donne est aujourd‘hui bouleversée. Largement parce que nous avons provoqué une partie de la vague de l'exil : en Irak où Tony Blair s'aligna sur la quête improbable d'armes de destructions massives, en Libye où nous fûmes alliés, le tout sans parler de l'Afghanistan.

La donne est aujourd‘hui bouleversée. Largement parce que nous avons provoqué une partie de la vague de l'exil: en Irak où Tony Blair s'aligna sur la quête improbable d'armes de destructions massives, en Libye où nous fûmes alliés, le tout sans parler de l'Afghanistan. En partie aussi parce que, dans sept ans, l'Inde sera plus peuplée que la Chine et que l'Afrique comptera 2,3 milliards d'habitants. L'explosion démographique de la planète n'en est qu'à son début et la responsabilité du politique devrait être d'y préparer au lieu de la nier. Qui, hors de son fauteuil de télévision et du Front National, peut prétendre sérieusement que la France maîtriserait demain cette pression en sortant de l'enceinte européenne, alors qu'elle est aujourd'hui aussi impuissante à Calais qu'elle l'était hier à Sangatte?

La tribune de Xavier Bertrand est donc justifiée, si elle vise à mettre le doigt sur une plaie ouverte et non à marquer un point dans une compétition régionale. Elle pêche en attribuant l'exclusivité des torts outre-Manche. Quinze ans après les 60 morts chinois de Douvres, les morts de Calais démontrent l'impasse dans laquelle nous sommes, à peine masquée par les coups de menton gouvernementaux de ce week-end. Davantage de barrières, de chiens, de barbelés? Pour quel résultat?

Aussi, proposer, comme le premier des ministres italiens ou grecs venu, de se défausser de ses obligations de contrôle garantit le succès d'estrade mais n'est que démagogie. Evidemment qu'un Etat, la France en l'espèce, est responsable de ce qui se passe sur son territoire et doit assumer ses obligations, indépendamment de celles qui incombent au Royaume Uni. Il serait plus avisé de rappeler que les migrants de Calais sont forcément entrés dans l'Union et en France via un autre Etat, l'échec des Etats membres à s'accorder en juillet sur un partage de l'accueil se traduisant sur le terrain. Calais n'est que l'abcès de fixation d'un système bancal. Cela ne veut pas dire qu'inverser le mouvement est simple.

De fait, deux butoirs au moins s'imposent à l'analyse. Le positionnement européen de la Grande-Bretagne est le premier. Derrière ses discours de façade, son attractivité vis-à-vis des migrants demeure suspecte, malgré les liens coloniaux, le patrimoine de la langue commune et la présence de fortes communautés d'accueil. Elle se place aujourd'hui très loin devant ses voisins, pour ce qui est des permis de résidence accordés à des étrangers pour des raisons économiques. Difficile de croire alors que les besoins de son marché ne s'étendent pas aux travailleurs clandestins et David Cameron pourrait s'attaquer avec la même virulence aux trafiquants de mains d'œuvre qu'aux propriétaires de logements d'immigrés ... Il reste que, demain, en cas de «Brexit», le problème resterait strictement identique, nos obligations étant inchangées et l'attraction justifiée ou non pour le Royaume Uni ayant toutes chances de perdurer.

Le respect des frontières européennes s'impose, sans lequel rien n'est crédible, ni matériellement ni techniquement, n'en déplaise aux partisans naïfs d'une Europe complètement ouverte.

La seconde contradiction est européenne. L'Union a établi un système de vases communicants qui nous conduit à un rapprochement inéluctable, dans le respect de nos valeurs comme dans celui de nos contraintes. Ici, le dogme de la libre circulation, sans laquelle nos économies seraient asphyxiées, se heurte à un impératif de contrôle et de sécurité que l'on ne peut écarter d'un revers. Le respect des frontières européennes s'impose, sans lequel rien n'est crédible, ni matériellement ni techniquement, n'en déplaise aux partisans naïfs d'une Europe complètement ouverte.

Donner la priorité aux poids lourds traversant la Manche et à Eurostar avait un prix à payer, que nous avons préféré ignorer, dans notre poursuite du bien-être économique. Il s'avère aujourd'hui trop lourd aux yeux de l'opinion publique dont 38 % estime que l'immigration est une préoccupation plus forte que le chômage ou la défense de l'environnement. Réclamer une Europe démocratique exige que l'on réponde à cette préoccupation.

Péniblement, les règles européennes nous offrent pourtant des pistes, en matière de protection des migrants comme en matière d'obligation de retour des migrants irréguliers vers leurs pays d'origine. En vain souvent. Indifférence, égoïsme et hypocrisie des Etats se conjuguent pour ne pas prendre le drame syrien à sa mesure, sauf en Allemagne ou dans les pays nordiques. Imposer à tous le respect contraignant des règles communes ou assumer le poids financier des politiques migratoires n'est pas acquis, pas plus que l'établissement d'une liste des pays sûrs et de ceux qui ne le sont pas.

Loin d'oeuvrer en ce sens, les Etats européens préfèrent se complaire à des calculs à courte vue, omettant l'essentiel: les causes de cet exil vers le territoire européen. Ni en matière de résolution des conflits où ils brillent par leur silence ni, a fortiori, en matière d'aide au développement d'un environnement dont l'explosion démographique réclame des réponses d'un autre calibre, leur positionnement individuel ou collectif n'est audible. La réponse à la crise de Calais se trouve pourtant à Alep autant qu'à Asmara. 

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Commentaires
T
le problème est aussi que la France a perdu sa souveraineté, et que ce sont les migrants et les délinquants qui font la loi
D
Entièrement d'accord.<br /> <br /> Bon mercredi, Serge<br /> <br /> ♥ Bisoux ♥<br /> <br /> <br /> <br /> Ƹ̵̡Ӝ̵̨̄Ʒ dom Ƹ̵̡Ӝ̵̨̄Ʒ
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